L’impact des deepfakes sur la sécurité des entreprises

L’impact des deepfakes sur la sécurité des entreprises

Temps de lecture : 4 minutes

Les deepfakes représentent aujourd’hui un défi croissant pour la sécurité des entreprises. Capables de reproduire de manière réaliste des éléments visuels et sonores, ils facilitent certaines fraudes, peuvent perturber des processus décisionnels et affecter la cohérence des structures organisationnelles. Cet article examine plusieurs cas récents, les points faibles exploités, les avancées en matière de détection, les approches de gestion des incidents, les aspects liés à la communication interne et externe ainsi que les implications éthiques. Il s’adresse aux décideurs en charge du numérique, de la cybersécurité, de la conformité et de la stratégie IT.

Menaces des deepfakes pour la sécurité des entreprises

Les deepfakes, fruits de l’intelligence artificielle issue du deep learning et des réseaux antagonistes génératifs (GANs), modifient en profondeur certains repères de la cybersécurité. Leur aptitude à imiter des visages, des comportements ou des voix permet désormais des intrusions qui seraient autrement plus complexes à réaliser. En 2024, une société à Singapour a subi une perte estimée à 25 millions de dollars à la suite d’un virement validé sur la foi d’une vidéo falsifiée d’un dirigeant financier. Selon plusieurs rapports techniques récents, les pertes cumulées dues aux deepfakes ont franchi les 200 millions de dollars au cours du premier trimestre 2025.

L’exploitation des biais humains par le biais de techniques d’ingénierie sociale renforcées par les deepfakes fait émerger des formes de fraude plus élaborées. Les organisations doivent revoir leur gestion de l’authenticité, adapter leurs infrastructures cloud et réévaluer leurs méthodes de vérification d’identité, qui deviennent moins fiables face à des contenus générés de façon presque indiscernable.

Parmi les vecteurs d’attaque fréquemment observés

  • La falsification d’identité lors de réunions virtuelles ou appels téléphoniques, menant au piratage de comptes confidentiels
  • La circulation de contenus erronés susceptibles d’influencer des marchés ou de nuire à l’image d’une entreprise
  • L’usage de menaces autour de fausses vidéos pour tenter d’obtenir des avantages ou de l’argent

Les impacts varient : pertes économiques, remise en cause de la crédibilité, interruptions dans les projets critiques ou encore démotivation des équipes. Des données récentes suggèrent qu’environ un tiers des entreprises interrogées remettent en question la validité de leur système d’identification à cause de ces menaces à l’apparence authentique.

Innovation technologique pour détecter les deepfakes

Face aux évolutions rapides observées dans les contenus trompeurs, la détection automatisée devient un chantier prioritaire. Elle repose sur des algorithmes d’IA, l’analyse de signaux biométriques et l’identification d’éléments visuels incohérents ou d’anormalités dans des expressions ou intonations.

Des sociétés spécialisées dans la sécurité informatique développent des outils capables de relever certains marqueurs numériques propres aux contenus truqués : petites erreurs visuelles, correspon­dances son/lèvres imparfaites, spectres sonores altérés, etc. La mise à jour régulière de ces technologies est nécessaire, car les outils de génération évoluent vite et rendent certaines approches moins efficaces.

Point de vue d’un chercheur en IA :

« La détection deepfake exige une combinaison de plusieurs couches de sécurité : intelligence artificielle, analyses comportementales et protocoles classiques de surveillance. L’aspect humain reste pourtant déterminant, car c’est souvent la méconnaissance ou l’inattention qui laisse passer les attaques. »

En parallèle, la Coalition for Provenance and Authenticity planifie le déploiement de normes globales favorisant la traçabilité des contenus numériques. Ces travaux servent de socle pour améliorer les méthodes actuelles. Les publications émanant de ces groupes peuvent servir de cadre aux professionnels pour affiner leurs stratégies de protection visuelle et sonore.

Gestion de crise face aux attaques par deepfakes

Une intrusion de type deepfake ne relève pas uniquement d’un problème technique. Il s’agit d’un événement à considérer avec méthode et coordination. Un schéma de gestion structuré inclut préparation, vigilance, intervention rapide et suivi. Voici les étapes centrales :

PhaseMesuresObjectif visé
PréparationSensibilisation du personnel, exercices réguliersRéduire les erreurs humaines
DétectionOutils de veille et alertes en temps réelIdentifier rapidement une tentative de manipulation
InterventionCommunication rapide et adaptée au contexteLimiter les impacts réputationnels
RepriseRetour d’expérience, ajustements internesRenforcer les dispositifs existants

Certaines entreprises testent régulièrement leur niveau de préparation via des scénarios d’attaque simulés. Ces démarches permettent d’améliorer les chaînes de décision, de repérer les processus défaillants et de corriger les protocoles avant qu’un incident réel ne survienne.

Mise en œuvre de stratégies de communication : Il reste préférable de répondre sans délai, avec précision et transparence. Une réaction lente ou hésitante nuit à la perception ressentie par les parties prenantes. Une information cohérente aide à conforter la confiance des collaborateurs et partenaires externes.

Communication et réputation

La réputation d’une organisation peut être rapidement exposée aux contenus falsifiés. L’approche préventive et la réactivité sont recommandées dès l’apparition d’un signal douteux. Lorsque des éléments suspects circulent, plusieurs leviers sont disponibles :

  • Émettre rapidement un message officiel, vérifiable et formulé de manière simple
  • Utiliser les canaux numériques de l’entreprise pour expliquer les faits
  • Impliquer les représentants internes afin de rassurer en interne comme à l’extérieur

« Lorsqu’une vidéo manipulée impliquant l’un de nos responsables est apparue sur les réseaux sociaux, nous avons partagé rapidement un message auprès de notre personnel, rédigé un communiqué et lancé une session de questions-réponses en ligne. Cette démarche concertée a aidé à apaiser les tensions. »

Travailler avec des partenaires techniques spécialisés dans la détection visuelle et sonore permet de soutenir les efforts de clarification. Une surveillance régulière des mentions en ligne constitue également une bonne pratique pour repérer rapidement les contenus suspects.

Implications éthiques

Le développement de contre-mesures face aux deepfakes soulève aussi des questions d’ordre moral. Les actions mises en place doivent toujours rechercher un équilibre entre sécurité et respect des enjeux humains, comme la vie privée et les droits fondamentaux.

Une sensibilisation spécifique doit accompagner l’implémentation de technologies de surveillance renforcée, en particulier si elles recueillent des données personnelles. L’intégration de garde-fous destinés à encadrer les usages est alors préférable, particulièrement dans les environnements régulés.

Une attention particulière mérite également d’être portée aux décisions prises sous l’influence d’outils automatisés. Dans certains contextes RH (embauche, promotion), une analyse biaisée pourrait introduire des discriminations indirectes. Il est recommandé d’impliquer les directions juridiques et éthiques dans la validation des usages technologiques relatifs à ce sujet.

Qu’est-ce qu’un deepfake ?

Il s’agit d’un contenu visuel ou sonore généré par des algorithmes pour donner l’apparence ou la voix réelle d’une personne existante.

Comment les reconnaître ?

Certains outils IA repèrent des incohérences typiques dans le mouvement, l’expression ou l’audio pour signaler un contenu suspect.

Comment les entreprises peuvent-elles renforcer leur sécurité ?

En formant le personnel, en disposant de plans de réaction adaptés, et en mettant en place des protections informatiques à jour.

Est-ce que toutes les entreprises sont visées ?

La taille ne protège pas automatiquement. Toutes les structures peuvent être ciblées, en particulier dans des contextes sensibles ou compétitifs.

Les deepfakes deviennent un enjeu significatif pour la sécurité d’information et la conformité en entreprise. Leur finesse technologique et leur précision croissante posent des défis qui appellent des solutions diversifiées : outils numériques, sensibilisation, mise en place de pratiques adaptées et réflexion continue sur le cadre légal et moral. Une préparation active reste l’approche la plus pertinente pour faire face à cette forme de nuisance technologique.

Sources de l’article

  • https://www.peren.gouv.fr/en/perenlab/2024-12-03-deepfakes/
  • https://www.pass.fonction-publique.gouv.fr/offre/detection-automatique-dimpostures-de-type-deepfakes